Une épidémie dans la vicomté de Rochechouart

Département de Rochechouart.

Mémoire de M. Simon.

On m'a adressé, de l'Intendance, au mois de Novembre dernier, trois petits Mémoires de M. Simon, Médecin à Rochechouart, dont voici l'extrait. Dans le premier, M, Simon dit que, depuis le 8 Mai jusques au 15 Juin, il a donné ses soins aux pauvres de la ville & paroisse de Rochechouart, ataqués d'une Epidémie dont il décrit ainsi les symptômes, après avoir donné une notice topographique des lieux.... » La maladie épidémique exactement suivie, nous a fait constament observer, chez tous les malades, une douleur considérable à la poittine, avec pesanteur, de la toux, de l'oppression, un crachement de sang, la peau sèche ; quelquefois une sensibilité à l'estomac, & des vomissèmens bilieux mêlés de vers. Si-tôt l'invasion, la plupart des malades étoient assomés, fans connoissance, & ne présentant qu'un pouls petit, foible & irrégulier, mais qui, quelques heutes après, s'élevoit & devenoit fort & plein. Cette maladie, que nous avons appelé Fluxion de poitrine essentiele, a ataqué beaucoup de gens de tout âge, excepté de la première jeunesse, Sc a été funeste à tous ceux qui se sont trouvés la poitrine foible, ou qui n'ont pas été secourus à temps. La maladie se terminoit otdinairement du neuf au onze, & plutôt chez ceux qui succonaboient ; dans plusieurs, elle a été suivie d'une convalescence longue & pénible, & dans d'autres, elle a entraîné des suites plus fâcheuses encore, comme des suppurations qui ont fini par la mott. » M. Simon reconoît pour causes, les froids de l'hiver & les vents constans au Nord-Est ; & il trace ainsi son plan curatif.... » C'est avec la plus grande satisfaction, dit-il, & le succès le plus marqué, que nous avons employé contre cette maladie (dans laquelle nous n'avons rien reconu d'extraordinaire que le nombre des malades de tous les côtés), les secours acoutumés dans l'inflammation de poitrine. Les saignées, les boissons pectorales, l'oxymel scillitique, le kermès & les lavemens ont été les moyens auxquels nous avons eu recours constament ; les minoratifs ont terminé la cure, sur-tout chez ceux dans lesquels nous avions observé les vomissèmens bilieux & les vers. » M. Simon donne la liste de ceux qu'il a guéris au nombre de dix-huit, & huit ont succombés ; & ajoute : « Je connois, dans les environs de ce pays, huit persones ataquées actuélement dabscèsà la poitrine, & quatre dans cette ville, morts phthisiques, dont la conformation ne devoit pas faire craindre cette maladie. »

Ce Médecin termine, en disant : « Quelqu'un, dans ce pays, s'étoit imaginé trouver une analogie entre la maladie dont il est question & celle qui courut : épidémiquement, l'année derniere, dans les paroisses de nos environs, notament Saint-Matthieu, &c. La sécheresse de la saison, les vents de Nord qui ont été continuels, auroient dus, entre ces deux maladies, faire soupçonner une différence essentiele ; l'émétique & le vésicatoire, qui guérissoient la première, eussent été mortels dans la seconde.

Le second Mémoire de M. Simon contient quelques détails sur l'Epidémie qui a régné à Mairval, qu'il décrit ainsi, en observant que cette paroisse contient nuit cens habitans.... » On remarquoit dans les amygdales, dans le voile du palais, aux deux côtés intérieurs de la bouche, dans le dedans des lèvres, des taches jaunâtres & quelquefois brunes, les environs des taches fort douloureux, & l'enflure fort peu considérable, la fièvre acompagnoit souvent les accidens ; le mal négligé dégénéroit en gangrené, avec une puanteur horrible ; il n'a araqué que des enfans, & en a enlevé plusieurs. La méthode que j'ai suivie avantageusement contre cette maladie, a été. dé faire enduire, souvent dans la journée, les parties ataquées, avec un mélange de demi-once de miel fur vingt goûtes d'esprit de sel marin, & de temps en temps un gargarisme, avec une simple infusion de sureau chez les enfans qui savoient le faire, la même infusion leur étoit donnée en boisson. ».

Dans le troisième Mémoire, M. Simon dit ne pouvoir donner de détails satisfaisans sur l'Épidémie de Chaillac, ayant trouvé les malades en convalescence lors de son arivée ; la plupart avoient été abandonés au foins de la nature : d'après ce qu'on lui raporta, il jugea que « cette maladie, qu'on avoit qualifiée du nom éfrayant de charbon, n'étoit autre chose qu'une fièvre ardente, bilieuse. La douleur de tête, le délire, la peau brûlante & aride, les vomissemes bilieux, les douleurs à l'orifice de l'estomac, les inquiétudes dans tous les membres, les urines rouges, étoient les symptômes les plus fréquens ; Le nombre des malades a été considérable, & celui des morts, depuis le mois de Février, se monte à vingt-un, dont on croit qu'il n'y en a que cinq à six ataqués de la maladie épidémique qui dura fort peu. »

Les Mémoires de M. Simon sont datés du 7 Novembre 1785, pour seconde copie.

Source : Recueil d'observations sur l'épidémie qui a régné en 1784 et 1785 dans la subdélégation de la Chataigneraye en Bas-Poitou, de Jean Pallu.

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