La châtellenie de Nontron au Moyen Âge

 La châtellenie de Nontron, qualifiée baronnie dès le commencement du XVe siècle, était la seigneurie la plus importante de la vicomté. Le revenu n'en était pas très-considérable, mais sa juridiction et ses priviléges étaient très étendus et comprenaient un grand nombre de paroisses et de seigneuries inférieures. Le château avait été des plus forts du pays de Limosin. D'après la dame de Montrésor, on n'en aurait pas construit un pareil pour 40 à 50,000 livres. La seigneurie devait rapporter annuellement plus de 1,500 livres. Alain d'Albret déclarait que le château n'était fort que parce que la venue en était mauvaise. L'édifice était pauvre et ruiné. Alain et Françoise de Bretagne y avaient fait faire un bâtiment qui avait coûté 300 livres. Le vicomte ne possédait dans la châtellenie d'autre domaine en propriété complète que le château. La plupart des habitants étaient francs de guet. Il n'y avait pas plus de 300 feux assujettis à cette redevance. Les tenanciers avaient le droit de chasse, moyennant une redevance au vicomte. L'infraction était punie d'une amende de 30 sols. La grande forêt de Nontron et la forêt de Ligurac (aujourd'hui Ligueux), qui en était une partie, appartenaient à divers seigneurs.

Le château avait été ruiné pendant les guerres séculaires qui avaient ravagé la vicomté. Richard Cœur-de-Lion avait juré de détruire tous les châteaux ou domaines des vicomtes de Limoges. Par lui ou ses successeurs, le serment fut rempli. En 1199, ses soldats avaient mis le siège devant Nontron et Puyagut et pillaient les environs lorsqu'ils apprirent la mort du roi blessé devant Châlus. Ils se retirèrent en déroute. En 1338, Ithier de Magnac fut nommé par la vicomtesse Jeanne gouverneur du château et de la châtellenie. Il livra, par trahison, le château aux Anglais qui s'y tinrent pendant longtemps. Charles de Blois-Chatillon, dit de Bretagne, mari de la vicomtesse, confisqua tous les biens d'Ithier de Magnac. Ils ne lui furent restitués qu'en 1367. A la fin du XVe siècle, la ville de Nontron était encore entourée de fossés sur lesquels il était expressément défendu de bâtir.

La famille de Magnac possédait de nombreux fiefs dans la châtellenie. Leur réunion constituait une importante seigneurie dépendant du repaire noble de Magnac, paroisse de Millac. Ithier de Magnac ne laissa pas d'héritier direct, et ses biens, après avoir passé sur la tête de la famille Paute, revinrent au vicomte. Trente-cinq paroisses et 18 seigneuries particulières dépendaient de Nontron. Quelques-unes de ces seigneuries, qui avaient justice plénière et ne devaient que l'hommage, étaient très-considérables et se qualifiaient de châtellenies ou même de baronnies. Nous citerons les grandes seigneuries de Condat, près Brantôme, de Bourzac, de Mareuil, de Champniers, de Varagne et La Coussière, de Javerlhac, de La Renaudie. Parmi les principaux hominagers figuraient : le prieur et curé de Nontron, l'aumônier de Nontron, les religieuses de Saint-Pardoux-la-Rivière, l'abbé de Peyrouse, les sieurs de Pompadour, du Barry, de La Valade, de Beaulieu, du Breuil, de Flamenc, de La Court, de Lavau, de Puychenin, de La Forêt, de La Mothe, de La Mourinie, de La Martonie, de Tryon de Montalembert, les bourgeois Pastoureau, de Puyzilhon, Camaing, Valhot, Raffeu, Reymonie, Jarry, habitants de Nontron. Le vicomte devait lui-même l'hommage pour la châtellenie à l'évêque d'Angoulême.

La seigneurie rapportait annuellement environ 200 livres en argent et 150 charges de froment, seigle ou avoine, compris les droits de justice et de police pour 100 livres. Antérieurement le rapport était beaucoup plus élevé. En 1367, les seuls émoluments de justice avaient produit 300 livres. Le péage et barrage de Nontron devait être assez productif. Toutes les marchandises introduites pour la vente dans la châtellenie payaient un droit de 4 deniers par livre pesant. En 1478-79, les droits de justice et police avaient donné, savoir : la prévôté, 48 livres ; le greffe, 33 livres ; le plaçage et leyde, 70 sols; les épaves, 65 sols ; le scel de la cour, 15 sols ; les amendes, 8 livres 10 sols.

La charge, mesure des grains, était composée de 3 setiers et le setier de 4 boisseaux.

La baronnie proprement dite, en dehors des terres soumises simplement à la suzeraineté, se composait des paroisses suivantes :

> La paroisse de Nontron, (chef-lieu d'arrondissement). Les habitants étaient francs de guet. Nontron était le siège d'un archiprêtré. Il y avait un couvent de Cordeliers, un hôpital et une ladrerie.

> La paroisse d'Abjat, (commune, canton de Nontron), avait parfois, avec les paroisses d'Augignac et de Saint-Pardoux-laRivière, fait partie de la châtellenie de Châlus. La forêt de Valeron, sise en cette paroisse, était contentieuse entre le vicomte de Limoges et le vicomte de Rochechouart. Au cheflieu était un repaire noble appartenant au sieur d'Abjat.

> La paroisse d'Augignac, (commune, canton de Nontron). Dans la paroisse était le repaire noble de Ligurac, qui devait l'hommage au seigneur de Magnac. Parmi les autres seigneurs fonciers figuraient les sieurs de Gastineau, de La Bauffarie, de Champniers.

> La paroisse de Bondazeau, (village, commune de Lussas). Le seigneur de Magnac possédait de nombreux fiets dans cette paroisse. Les sieurs de Bozon et de Grave y tenaient aussi des héritages en fondalité.

> La paroisse de Bourdeix, (commune, canton de Nontron). Le sieur de Bourdeix, qui possédait un repaire noble au chef-lieu, était le principal seigneur foncier. Un peu plus tard, ses possessions furent érigées en seigneurie distincte.

> La paroisse de Bourzac, (hameau, commune de Vendoire, canton de Verteillac), siège de la seigneurie de Bourzac, de laquelle dépendaient presque tous les héritages de la paroisse.

> La paroisse de Busserolles, (commune, canton de Bussière-Badil). Le sieur des Cars, à cause de sa seigneurie de Varagne, était le principal seigneur foncier.

> La paroisse de Champeaux, (commune, canton de Mareuil). L'ancienne paroisse de La Chapelle-Pomiers était réunie à celle de Champeaux. Dans cette paroisse était le repaire des Bernardières, chef de la seigneurie de ce nom, dont les possessions s'étendaient sur les paroisses de Lussas et de Saint-Sulpice. La famille d'Oradour avait aussi des fondalités dans la paroisse de Champeaux.

> La paroisse de Champniers, (commune de Reillac et Champniers, canton de Bussière-Badil), formait une seigneurie distincte appartenant au sieur de Champniers (en 1472, Jean de Laporte). Le vicomte y possédait très peu de chose. Ses officiers avaient contesté le droit de haute justice au sieur de Champniers, mais la cour de Nontron avait, en 1409, reconnu et consacré les prérogatives du vassal.

> La paroisse de La Chapelle-Montmoreau, (commune, canton de Champagnac-de-Belair). Très-petite paroisse où les fondalités étaient très divisées.

> La paroisse de Connezac, (commune, canton de Nontron). La plus grande partie de la paroisse appartenait en fondalité à la famille de Maulmont et formait une petite seigneurie. En 1464, Damoiselle Agnès de Maulmont rendit hommage au vicomte pour le lieu de Connezac, avec toute justice haute, moyenne et basse.

> La paroisse de La Fouillade, (commune, canton de Montbron), Cette paroisse avait été contentieuse entre les vicomtes de Limoges et les comtes d'Angoulême. Les sieurs Yvonnet et Jean de Saint-Laurent étaient hommagers du vicomte pour la terre et seigneurie de La Fouillade. Ils prétendaient posséder la justice haute et basse et le droit de vigerie.

> La paroisse de Javerlhac, (commune, canton de Nontron). Une partie était de la seigneurie de Magnac. Le surplus formait une petite seigneurie. Un repaire noble, dit de SaintRobert, et une chapelle du même nom étaient sis dans cette paroisse.

> La paroisse des Granges, (aujourd'hui Les Graulges, au nord de La Roche-Beaucourt). La seigneurie de Bourzac s'étendait sur cette paroisse. Le vicomte y avait peu de chose.

> La paroisse de Lussas, (commune, canton de Nontron). Une partie de la paroisse était de la seigneurie de Magnac.

> La paroisse de Marval, (commune, canton de Saint-Mathieu). La famille de La Martonie possédait des fondalités dans cette paroisse.

> La paroisse de Millac, (commune, canton de Saint-Pardoux-la-Rivière). Dans cette paroisse était anciennement le repaire de Magnac, chef de la seigneurie de ce nom. Cette importante seigneurie s'étendait principalement dans les paroisses de Millac, Bondazeau, Saint-Etienne, Nontron, Saint-Pardoux, Saint-Front, et possédait de grands priviléges et de nombreux droits d'hommage et de ressort. Le seigneur de Magnac exerçait la vigerie dans la paroisse, il percevait un droit d'acapte de deux sols à chaque mutation d'abbé du monastère de Dalon. Soumis à l'hommage envers le vicomte, il était en outre astreint à fournir chaque année le pain et le vin de la communion du jour de Pâques à Nontron. Nous avons déjà dit qu'Ithier de Magnac, dont tous les biens avaient été confisqués pour soupçon de félonie, n'avait pas laissé d'héritier direct. En 1384, Gui Paute, chevalier, réclama la succession d'Ithier, comme plus proche descendant d'Excelline de Magnac, sour germaine d'Ithier. En 1390, les biens furent attribués à titre provisoire à Mondot, Paute qui était sans doute fils de Gui. Mais le vicomte, qui avait joui pendant quelques années de cette belle seigneurie, s'arrangea pour la reprendre et désintéressa les héritiers. Tous les droits et hommages dus au seigneur de Magnac ressortirent désormais directement au vicomte. Les sieurs de Millac, de Pouzols, de Juge, de Bort, étaient les principaux vassaux du seigneur de Magnac dans la paroisse de Millac. La famille de La Martonie y possédait le repaire noble de ce nom avec des fondalités.

> La paroisse de Nontronneau, (lieu, commune de Lussas), réunie à la commune de Lussas, était en partie de la seigneurie de Magnac.

> La paroisse de Pluviers, (commune, canton de Bussière-Badil). Partie du vicomte et de la seigneurie de Magnac, partie de la châtellenie de Piégut , le repaire noble de Piégut ou Puyagut, sis dans la paroisse, servait autrefois de prison pour la châtellenie de Nontron. Au commencement du XVe siècle, Thibault de La Gourblaye, capitaine de la châtellenie, y résidait. Jean de Bretagne voulant récompenser ses services, érigea en seigneurie les terres qui dépendaient du château et s'étendaient dans les paroisses de Pluviers, Saint-Barthélemy et Saint-Etienne-Ledros, et en fit don à son capitaine. Il paraît résulter des mémoires que Jean de Bretagne n'avait attaché à la seigneurie que le droit de basse justice et s'était réservé avec l'hommage toutes les matières privilégiées, telles qu'appel, pleige, sauvegarde, excès et toutes les causes au-dessus de 60 sols et un denier. Les héritiers de Thibault de La Gourblaye étendirent leurs droits, et de son côté, Alain d'Albret, prétendant que la donation était nulle, revendiqua la pleine possession de la seigneurie. A la fin du xve siècle, le procès était pendant avec Antoine Hélie de Colonges, époux d'Isabeau de La Gourblaye.

> La paroisse de Quinsac, (commune, canton de Champagnac-deBelair), en partie de la seigneurie de Bruzac. Au bourg, un repaire noble devant l'hommage au vicomte.

> La paroisse de Reillac, (commune, canton de Bussière-Badil). Au xive siècle, il y avait une maison du Temple à Reillac. Le sieur de Magnac lui payait des redevances. La commune de Reillac et Champniers a été formée avec les deux paroisses de ce nom.

> La paroisse de Romain, (commune, canton de St-Pardoux-laRivière), était en partie de la seigneurie de La Coussière. Le sieur de Romain y tenait un repaire noble avec des héritages en fondalité.

> La paroisse de Saint-Angel, (commune, canton de Champagnac). Il y avait au bourg un repaire noble duquel dépendaient de nombreuses fondalités.

> La paroisse de Saint-Barthélemy, (commune, canton de Bussière-Badil). En partie de la seigneurie de Piégut. Le sieur de La Salamonie était seigneur foncier dans la paroisse.

> La paroisse de Saint-Étienne-le-Droux, (lieu, commune de Bourdeix). Les seigneuries de Magnac et de Piégut s'étendaient dans cette paroisse. Les dîmes étaient au seigneur de Magnac et au curé. Le prévôt des Cars, religieux de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges, avait des héritages en directe dans la paroisse. La famille de Peyrat y tenait le repaire noble du Brieude, en la justice de Piégut.

> La paroisse de Saint-Front de Champniers, (commune, canton de Nontron). En partie de la seigneurie de Magnac. Les familles de Montfrabeuf et Paute possédaient des seigneuries foncières dans la paroisse. A la fin du XIVe siècle, les tenanciers du mas ou maine de Las Nouaillas, paroisse de Saint-Front, étaient encore serfs, taillables, quétables et exploitables à la volonté de leur seigneur, Guy Paute, donzel de Nontron.

> La paroisse de Saint-Front-la-Rivière, (commune, canton de Saint-Pardoux). En partie de la seigneurie de Magnac. Dans la paroisse était le siége de la petite seigneurie de La Renaudie, qui s'étendait sur la paroisse de Quinsac.

> La paroisse de Saint-Martial-de-Valette, (commune, canton de Nontron). Le seigneur de Magnac avait quelques vassaux nobles dans cette paroisse, entre autres les sieurs du Mont, du Bois et de Lobestor. Il y avait au bourg un repaire noble,

> La paroisse de Saint-Martin-le-Peint, (commune, canton de Nontron). La famille Tison, qui devait l'hommage au seigneur de Magnac, possédait de nombreux héritages en seigneurie directe dans cette paroisse et celles de Saint-Martial-de-Valette, Bondazeau et Nontronneau.

> La paroisse de Saint-Pardoux-la-Rivière, (chef-lieu de canton). La famille Seguin possédait anciennement de nombreux héritages en fondalité au bourg et dans la paroisse. Elle remontait à Ademar Seguin, écuyer, seigneur de Saint-PardouxLa-Rivière, qui fit son testament en 1303. (Arch. des B.-P. E, 608). Il y avait au bourg un couvent de religieuses de l'ordre dė Saint-Dominique.

> La paroisse de Saint-Robert, (village, commune de Teyjac), ancienne paroisse de peu d'importance, réunie plus tard à Teyjac.

> La paroisse de Saint-Saud, (commune, canton de Saint-Par. doux-La-Rivière). Une enclave était de la châtellenie de Chalus. Dans la paroisse était le siége de la seigneurie de La Coussière, ordinairement unie à celle de Varagne.

> La paroisse de Savignac, (commune, canton de Nontron). La famille Prévost possédait des héritages en directe dans la paroisse. Anciennement elle y avait des serfs. En 1261, Bernard, Guillaume et Hélie Prévost vendirent à Vierne veuve de Gui Doa, de Nontron, Pierre Faure leur homme lige, avec toutes ses terres et possessions et les servitudes auxquelles il était tenu. (Arch. des B.-P., E, 608).

> La paroisse de Teyjac, (commune, canton de Nontron). Le seigneur de Bourdeix avait de nombreuses possessions dans la paroisse.

> La paroisse de Varagne, (commune, canton de Bussière-Badil). Siège de la seigneurie de Varagne appartenant au sieur des Cars et qui, avec celle de La Coussière, s'étendait sur les paroisses de Busserolles, Soudat, Javerlhac, Saint-Saud et Saint-Robert.

Source : La vicomté de Limoges, géographie et statistique féodales, de Gustave Clément-Simon.

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